Réflexions d’une fille qui aimerait avoir le temps de s’ennuyer
Je commence une nouvelle rubrique « billets d’humeur » Ces dernières semaines, nous avons accueilli pas mal de monde à Bristol lors des weekends et je me rends compte maintenant à quel point je suis fatiguée. Nos soirées en semaine se sont transformées en récupération de nos weekends (repos, tâches ménagères) et préparation du prochain weekend. Je regarde mon planning des prochaines semaines, assez rempli, et je me dis : « quand pourrais-je enfin m’ennuyer » ?
Mon premier problème : vouloir tout faire
C’est assez drôle, car en décembre, j’avais prôné le coocooning et mis à bas le FOMO ou Fear of Missing Out (« la peur de rater quelque chose). Mais je crois que c’est exactement ce dont je souffre : vouloir tout faire car j’ai peur de passer à côté de quelque chose.
Je veux à la fois : penser à mon avenir professionnel et me former à autre chose, apprendre une langue étrangère, voir les amis et la famille venus de France, découvrir la région et profiter des événements locaux, partir en vacances, tout en continuant à avoir une vie sociale à Bristol. C’est trop. Je m’en rends compte.
La charge mentale
Tout évènement présuppose de la préparation. Une formation ? Il y a les devoirs maison. De la famille qui vient ? Il faut ranger, préparer la maison et faire des courses. Etc.
J’en arrive à regarder mon planning futur et simplement penser à tout ce qu’il faudrait faire. Et je réalise aussi que cette peur de rater les choses me crée de la charge mentale.
On appelle la charge mentale l’ensemble des tâches à faire mais aussi à penser pour le bon fonctionnement du foyer, qui touche en priorité les femmes par rapport aux hommes.
Dans ce cas précis, je ne distingue pas les genres, mais je mets simplement en évidence que si je enthousiaste à l’idée de faire certaines activités, elles impliquent la nécessité de les prévoir et m’occupent forcément l’esprit.
Eloge de l’ennui
« La Nature a horreur du vide ». C’est vrai, le vide fait peur et c’est aussi pour cette raison qu’on remplit tant nos agenda. Le notre est rempli d’activités prévues avec d’autres personnes.
Pourtant, je suis une personne de type introverti, qui a besoin de solitude pour se ressourcer. Ce que j’aime, c’est lire, faire des activités manuelles. Etre seule dans ma bulle, et ne rien faire.
Je parle de l’ennui, mais ne rien faire à mes yeux n’est pas synonyme d’ennui. C’est le moment où je peux faire « pause », où je peux respirer. Et je soutiens que l’ennui a des bienfaits qui ne sont pas assez valorisés dans la vie moderne. Selon un article de « Ca m’intéresse »(1), l’ennui permettrait de :
Et je soutiens que l’ennui a des bienfaits qui ne sont pas assez valorisés dans la vie moderne. Selon un article de « Ca m’intéresse »(1), l’ennui permettrait de :
- Booster la créativité
- Laisser au cerveau ces espaces où il peut construire sa mémoire
Mon deuxième problème : ne pas vouloir heurter les autres en disant non
Mes semaines sont aussi remplies car je ne sais pas dire non. Je n’ai pas envie de déplaire.
Donc quand une personne propose quelque chose, je ne veux pas la heurter et lui dire que ce n’est pas possible. D’abord, parce que j’ai peur qu’on ne me propose plus rien. Et je suis consciente que l’amitié a besoin d’être nourrie. Ensuite, parce que j’ai peur de créer un ressentiment. Et je déteste les conflits.
C’est bête à dire, mais j’ai l’impression que dire « non »à quelqu’un, c’est dire « non » aux opportunités que je pourrais avoir.
Alors, je « presse » mon agenda pour pouvoir faire tout tenir. Mais au final, j’ai l’impression de subir l’agenda des autres. (ah la la, « l’enfer, c’est les autres » !)
Se considérer comme sa propre priorité…
Il est évident qu’il n’est pas possible de tout faire. D’où l’importance de prioriser. Et prioriser d’abord SES besoins : ce qui est important pour son bien-être. Ça peut ne pas être la même priorité que celle des autres, mais j’imagine que c’est ce que signifie « s’affirmer » : savoir ce dont on a besoin plutôt que simplement faire plaisir, et accepter qu’on est différent des autres.
Je sais bien que ça peut heurter d’entendre que la personne qu’on propose de voir préfère ne rien faire plutôt que de nous voir. Mais parfois, « rien » est important.
Certains diront aussi que j’exagère, et que j’ai suffisamment de temps pour moi. Mais même si je ne croule pas sous la surcharge (je crois que dans ce cas, je me serais effondrée hein !), ce qui compte, c’est ce que je ressens.
… pour être plus à l’écoute de son entourage
L’avantage, c’est que la relation avec l’autre s’en trouvera améliorée.
On ne le dit pas assez, mais à force de vouloir faire plaisir aux autres, on peut en ressentir une sorte de frustration. Cela s’en ressent dans la relation avec l’autre :
- je ne suis pas aussi attentive à l’autre, car mon esprit pense à ce dont je n’ai pas eu le temps de faire et qu’il faudrait faire
- je n’éprouve pas autant de joie à être avec l’autre, car à certains moments, j’aimerais juste être seule. Par exemple, je suis prête à faire moins de choses avec Mr Platypus car j’ai juste besoin de repos
- je suis moins flexible par des propositions de dernières minutes car j’ai déjà autre chose de prévue
Conclusion
André Gide disait « Choisir, c’est renoncer. ». Pour moi, cette phrase s’applique parfaitement.
C’est renoncer, oui, mais c’est aussi se demander ce qui est le plus important. A force de vouloir tout faire, j’ai l’impression que je cours après les évènements sans en profiter. A force de dire « oui » aux autres, j’ai l’impression de privilégier leur agenda aux dépens du mien. Au final, la fatigue est non seulement physique mais aussi émotionnelle.
Le temps où je ne fais rien me manque. A défaut d’avoir eu ces derniers temps le loisir d’écrire dans mon journal personnel, j’ai pu écrire cet article (plus structuré que dans un journal personnel !) et me rendre compte de ce qui n’allait pas ces dernières semaines. Maintenant, c’est à moi de jouer
Et vous ? Est-ce qu’il vous est déjà arrivé d’être dans cette situation ? Quelles sont vos astuces ?
Le lien sur les bienfaits de l’ennui est disponible ici : https://www.caminteresse.fr/psychologie/les-bienfaits-insoupconnes-de-lennui-11115282/